18 décembre 2025

Pino L'I.A. Émotionnelle

de Takashi Murakami

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978-2811674809

"Pino" est un manga et ordinairement je ne lis pas de manga. Je n’en lis pas en premier lieu parce que je n’apprécie pas la façon dont les mangakas dessinent. Cette fois, cependant, je me suis laissé tenter par le billet de Fanja car le thème m’intéressait beaucoup : Les IA peuvent-elles avoir des sentiments ? Vaste sujet. 

En ce qui concerne le graphisme, je n’ai d’ailleurs pas trop à me plaindre. Il est bien un peu figé sur les personnages (surtout ce pauvre M. Iwata) mais, quand on voit les décors, ceux-ci compensent. C’est également la première fois que je lis plus de 300 pages imprimées de droite à gauche, tant pour les pages que pour les lignes et on ne peut pas dire que j’aie apprécié. Quand on interroge sur ce point les fans européens de mangas, ils vous répondent doctement que c’est parce que les textes asiatiques se lisent dans ce sens mais c’est une blague. Pourquoi dans ce cas, imprimer les romans asiatiques ou arabes dans le sens européen de lecture ? Non, je pense que c’est un petit truc en plus, mi-snobisme, mi intérêt qu’il y a toujours à créer une "caste" d’initiés et à s’y trouver. En fait, selon moi, il n’y a aucune raison de procéder ainsi, mais comme ce n’est pas moi qui décide…

Voici l’histoire : Dans une époque future, les laboratoires pharmaceutiques pratiquent encore l’expérimentation animale. Ils n’en ont pas vraiment besoin et cela ne leur apporte quasiment aucun avantage, mais "quasiment aucun" n’est pas zéro, et comme ils n’ont pas d’éthique, ils pratiquent. Pour résoudre un peu tous les problèmes qui pourraient se poser, ils les font gérer par un petit robot androïde qui, scellé dans un laboratoire isolé, reste dans sa bulle. Il est conçu pour faire naître, soigner et pratiquer des expériences sur les animaux. Choses qu’il fait parfaitement. Ces androïdes sont appelés PINO. On leur a donné une apparence proche de celle d’un enfant pour des raisons techniques et psychologiques. Un jour, la loi change et toute expérimentation animale est interdite, aussi le groupe pharmaceutique décide-t-il de détruire totalement son laboratoire. PINO est chargé de le faire.

...


Des années plus tard, des PINO sont encore utilisés. C’est la génération 3. Ils sont tout particulièrement dédiés à des tâches de soins aux humains, aux animaux ou aux plantes, mais d’autres peuvent par exemple faire du déminage ou de l’enseignement. Ils sont très efficaces. Nous allons suivre l’un de ces nouveaux PINO qui tient auprès d’une vieille dame sénile, le rôle du petit garçon qu’elle a perdu des décennies plus tôt et qu’elle croit voir en lui. Il est en fait son soignant et son auxiliaire de vie. Nous sommes dans un quartier particulièrement pauvre d’un monde très abîmé. Par ailleurs, nous faisons la connaissance de M. Iwata qui avait fait une enquête sur la destruction du labo pharmaceutique et était parvenu à la conclusion que les problèmes avaient été dus au fait que ce PINO 1ère génération avait éprouvé une émotion. Cette expertise réputée invraisemblable, lui avait immédiatement valu de perdre son emploi. Maintenant chômeur, il poursuit cependant ses recherches pour confirmer ou infirmer que les PINO peuvent éprouver des sentiments. C’est ce que ce manga nous raconte.


Comment tout cela finira-t-il ? Et surtout, quelle est exactement notre position vis-à-vis des I.A, émotionnelles ou non ? Que peuvent-ils pu ne peuvent-ils pas faire, être, apporter ? Sont-ils un plus ou un moins pour nous ? Nous, qui sommes à coup sûrs des êtres émotionnels, nous y attachons nous comme à un moulin à café ou comme à un être ? Vous savez, nous, les humains qui avons toujours donné des petits noms à nos voitures ?

Une phrase est à la mode en ce moment. Elle est du poète Pierre Reverdy : "Il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour", mais alors, si un robot donnait des preuves d’amour, qu’en serait-il ?

Et d'abord, que sont exactement les sentiments ?

17 décembre 2025

15 décembre 2025

 Rubrique-à-brac (5 volumes)

de Marcel Gotlib

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978-2205055726

Je fais partie des anciens enfants élevés avec un abonnement à Pilote ("Le journal qui s'amuse à réfléchir") J’étais fan absolue d’Achille Talon (mais de lui, je vous parlerai une autre fois), de "Cellulite" de Brétécher et des Dingodossiers, dessins Gotlib et textes Goscinny. Les Dingodossiers prétendaient étudier un sujet de façon scientifique en deux pages de ces petites cases pleines de phylactères que nous apprécions tant. L’humour (potache mais irrésistible) provenait, d’une part, du décalage entre le ton objectif et sérieux et la naïveté de l’observation, et, d’autre part, du décalage entre le texte et le dessin.

J’adorais ! Et je n’étais pas la seule, ça marchait bien, mais parallèlement, René Goscinny, avait lancé les aventures d’Astérix et le succès était encore plus énorme et fulgurant, si bien qu’il ne pouvait plus mener les deux opérations de front. A partir de 1968, Gotlib poursuit donc seul la grande tâche éducative et les Dingodossiers laissent la place aux Rubriques à Brac. Le principe reste le même ainsi que les personnages récurrents, et vogue la galère ! Repartie pour de nouvelles aventures hautement pédagogiques.


Mais parlons-en, des personnages récurrents. Chacun avait ses préférés, pour moi, Isaac Newton, qui ne quittait guère le pied de son pommier et sur la tête duquel tombaient les choses les plus incongrues, permettant chaque fois une découverte scientifique de première grandeur. Un autre personnage cher à mon cœur, le Processeur Burp, non pas pour son charme personnel discutable, mais parce qu'il était chargé des pages "sciences naturelles" qui me ravissaient littéralement . Des décennies plus tard, je me réfère encore à l’occasion à "la dure loi de la nature" dont les ravages navrants m’avaient beaucoup fait rire alors. (et encore maintenant, soyons honnête)

Il y avait aussi l'Enfant sauvage, Super-Dupont, l'Ecolier, Tarzan et le duo policier clairement inspiré de Maigret ou des Cinq dernières minutes, Bougret et Charolles et là, je remercie Wikipedia qui m’a appris depuis qu’ils étaient les caricatures respectives de Gébé et Gotlib. Les deux flics menaient des enquêtes totalement surréalistes mais dans lesquels on retrouvait "chaque fois deux suspects : Aristidès Othon Frédéric Wilfrid, caricature de Fred, et Blondeaux Georges Jacques Babylas, caricature de Goscinny, ce dernier se trouvant toujours être le coupable".


Dans le coin des cases, il y avait une petite coccinelle. Simple décoration amusante au départ, elle a beaucoup plu aux lecteurs (et sans doute aussi à l’auteur) si bien que son rôle est allé grandissant, elle portait sur les scènes qu’on nous montrait un regard critique et désabusé qu’elle a même fini par exprimer quand elle a été dotée de la parole.

La Rubrique-à-brac a survécu à Pilote et même aux autres mensuels de bande dessinée qui lui ont succédé. Certaines histoires prenaient trois ou quatre pages et il y a eu des planches en couleur. Elle a été éditée en albums, et il y en a eu cinq, pour les amateurs.

Maintenant, la Rubrique-à-brac est-elle accessible aux jeunes d’aujourd’hui ? Je le voudrais bien, mais je n’en sais rien. Je n’en suis pas sûre. C’est une forme d’humour qui échappe peut-être à leurs radars, il faudrait tester. Vous me direz...


10 décembre 2025

L'heure des prédateurs

de Giuliano da Empoli

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978-2073113207

Ma lecture de ce livre est partie sur un malentendu. Quand je l’ai pris, c’était parce que je m’attendais à un roman, dans le style du "Mage du Kremlin" que j’avais bien aimé et qui avait été un franc succès commercial. J’ai tout de suite compris le malentendu mais au bout du compte, je ne regrette pas ma lecture qui a été très instructive.

J'ai été accueillie par un court prologue où l'auteur fait un parallèle entre lui-même et un scribe aztèque rendant compte de ce qui s'est passé à partir du moment où les autochtones ont rencontré les Espagnols. De là à comprendre qu'il nous voit dans le rôle de la civilisation finissante, il n'y a qu'un pas… qui est immédiatement franchi et l’auteur, politicien toujours dans les coulisses de tel ou tel évènement important, nous en livre des scènes parlantes.

« Comme dans le cas de Moctezuma, leur docilité n’a pas suffi à assurer la survie de nos gouvernants : après avoir fait mine de respecter leur autorité, les conquistadors ont progressivement imposé leur empire. Aujourd’hui, l’heure des prédateurs a sonné et partout les choses évoluent d’une telle façon que tout ce qui doit être réglé le sera par le feu et par l’épée. »

Introduit partout, Giuliano da Empoli est extrêmement bien placé et il n’ignore rien de ce qui se passe d’un peu important. Mieux, il est dans les coulisses et voit comment cela se passe. Il nous livre ensuite une série de courts textes datés et situés qui nous en disent beaucoup sur l’état réel des choses en dehors des discours convenus et déclarations officielles. C’est tout à fait éclairant. Je m’en doutais mais ne suis pas particulièrement satisfaite de me le voir confirmer.

« Le chaos n’est plus l’arme des rebelles, mais le sceau des dominants. » … « Donald Trump, puisqu’on parle de lui est une forme de vie extraordinairement adaptée au temps présent. L’un de ses traits, dont ses conseillers, en hommage à une époque désormais révolue, se plaignent encore à voix basse, alors qu’ils devraient s’en gargariser haut et fort, est qu’il ne lit jamais. (…) Ni une page, ni une demi-page, ni une seule ligne. Il ne fonctionne qu’à l’oral. Ce qui représente un défi considérable pour quiconque souhaite lui transmettre la moindre connaissance structurée »

Je dois dire que ces courts articles se "dévorent" littéralement. Ce sont des scènes très vivantes, précises, au cœur de l’action et cela a beau être très documenté, ça n’est jamais assez long pour lasser. On reproche à l'auteur son pessimisme, d'autres appellent ça sa lucidité. Je suis dans le deuxième camp, même s'il a peut-être un peu sous-estimé notre sens de l'humour. On ne sait jamais. Et je ne pense pas que sa vision de l’IA qu’il évoque vers la fin de l’ouvrage soit très juste. Elle s’appuie d’ailleurs sur l’analyse de Kissinger qui était à mon sens trop un homme du passé pour bien sen saisir les enjeux. (juste mon avis)

Conclusion : Si vous voulez des infos sur la réalité, lisez-le. Si vous n’aimez pas les mauvaises nouvelles, passez votre chemin.

06 décembre 2025

La mer à l’envers

de Marie Darrieussecq

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978-2072936296

Bon, disons-le tout de suite, trois étoiles, je n’ai pas accroché avec ce livre. On va voir pourquoi.

D’abord, l’histoire : Rose, psychologue pour enfants parisienne, fait une croisière sur un de ces immeubles flottants qui labourent la Méditerranée. Elle est accompagnée de ses deux enfants, tandis que son mari, agent immobilier qui a le whisky chic, est resté at home. L’idée est de faire une pause et de se recentrer, car Rose est arrivée à un tournant de sa vie. Elle a quarante ans et quitte Paris pour s’installer dans la demeure familiale dont elle a hérité, et retrouver donc la province. Pour l’instant, elle se laisse aller à l’indolence de la croisière vers la Grèce. On en profitera pour montrer le Parthénon au fils aîné, c’est bon pour ses études. Mais, comme pour tous, cette croisière, c’est surtout une pause hors du temps et de la réalité. Farniente, trop manger, trop boire. Mais une nuit, grand branle-bas : le bateau se trouve en présence d’une embarcation fragile, pleine de migrants clandestins africains. Ils montent à bord, et Rose, qui est là, remarque un adolescent noir, seul et si démuni qu’elle est émue. Il est nigérien, il s’appelle Younes ; en dehors de cela, ils ne se comprennent pas. Sans doute en quête d’actes plus brillants dans sa vie que le train-train quotidien, elle lui apporte rapidement des vêtements chauds de son fils, et lui donne même le téléphone de ce dernier. Puis, à la première escale, les clandestins sont débarqués — elle ne sait pour quel avenir — mais, on l’a deviné, le téléphone restera un lien et, plus tard, Younes, clandestin livré à lui-même et perdu, la contactera.

Pendant ce temps, la croisière s’est, bien sûr, terminée et la vie a repris. Rose a retrouvé son mari picoleur, mais gentil, au fond. Elle redécouvre la vie de province, où elle a ouvert un cabinet et attend de se faire une réputation pour qu’on lui envoie des patients, mais les gens d’ici sont plus attirés par les pratiques non scientifiques en tous genres que par la médecine classique (je la rassure, il y en a autant à Paris, c’est juste qu’elle ne les avait pas vus). Mais ce n’est pas grave, car voilà qu’elle-même se découvre un don de "toucheuse" (bah voyons), et sa petite entreprise prospère peu à peu.

Bon, je vous en ai assez dit sur l’histoire. Je vais essayer maintenant de comprendre pourquoi j’ai été perpétuellement agacée du premier au dernier mot. D’abord, le style. Vraiment, je n’ai pas trouvé de charme à l’écriture utilitaire de Marie Darrieussecq. Ça raconte l’histoire, ça ne la transcende pas. Il n’y a pas une seule phrase qu’on ait envie de relire pour s’imprégner de sa beauté. Ensuite, les personnages : Younes, dont on finit par ne plus savoir si c’est un ado, pourquoi il a quitté le Niger où sa famille semble aisée, et notre Rose ! Je n’ai pas du tout aimé cette bobo, c’est le moins qu’on puisse dire. L’argent trop facile, le gagne-pain « à la noix », la position toujours un peu bâtarde vis-à-vis de Younes (et de tout, d’ailleurs), sa meilleure amie qu’elle n’aime pas, en fait, son mari qu’elle hésite à garder, la vie trop facile dont elle n’a pas conscience, sa bonne conscience, justement, ses certitudes molles et son absence de toute autocritique… Bref, quelqu’un que je ne chercherais pas à fréquenter si je la rencontrais, mais avec laquelle il a fallu que je cohabite pendant des pages. D'autre part, tout est montré comme étant vécu superficiellement, sur le mode du ressenti immédiat, sans réflexion, sans approfondissement ni analyse, et ce point m'a gênée et déçue. Qu'un auteur montre juste des faits sans les commenter, c'est une chose, mais que le personnage principal vive tout sans dépasser la surface des choses... 


02 décembre 2025

J'aurais dû épouser Marcel

de Françoise Xenakis

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978-2843374692

On ne lit plus guère Françoise Xenakis qui eut pourtant son époque, mais il me fallait absolument un X pour mon Challenge ABC avant la fin de l’année et on était déjà en novembre, alors j’ai scruté les rayons de la médiathèque en cherchant un livre pas trop épais (manque de temps) et ce fut celui-ci.

Il commence par une introduction de l’auteure elle-même : « Normalement, à l’âge que j’ai, après quelque vingt-trois romans et récits, il ne me reste plus qu’à écrire LE livre qui m’a fait me promettre à moi-même – j’avais alors neuf ans – que, plus tard, je deviendrais écrivain. La boucle sera alors bouclée et j’en aurai fini avec l’écriture ! (…) Ce récit, je vais avoir soixante-dix neuf ans et il n’est toujours pas écrit ! »

Eh bien, mauvaise nouvelle, ce ne sera encore pas pour cette fois. D’abord parce que ce roman est en fait constitué de nouvelles autour d’un thème commun, que F. Xenakis a à peine reliées d’une trame très légère. Ce genre de bricolage peut être plaisant à lire (et c’est le cas ici), mais ne donne pas de chefs-d’œuvre littéraires. Le thème commun évoqué ci-dessus, ce sont les « veuves blanches » solognotes. L’éditeur nous explique :

« C'étaient, pour la plupart, d'anciennes gamines de l'Assistance publique, débarquées un beau jour d'un car bringuebalant et placées dans les fermes. Les gars, eux, devenaient charretiers, les filles vachères, et, aussi perdus les uns que les autres, ils se mettaient le plus souvent à la colle". En 1914, les garçons furent mobilisés et il n'en revint pratiquement pas. On ne les déclara même pas morts au champ d'honneur, mais disparus. Que faire de ces jeunes femmes seules au village? On les logea dans un minuscule lotissement bâti pour l'occasion et la République leur octroya une modeste pension. En échange de quoi, une loi non dite exigeait d'elles une chasteté absolue, l'entretien de l'église et des tombes à l'abandon. Ces vieilles filles ne cessèrent de fantasmer sur le retour de leur homme. »

Françoise Xenakis a donc imaginé six ou sept récits dans lesquels les veuves en fin de vie font le bilan de leur existence de misère. Condamnées à la solitude, jamais vraiment intégrées au village, elles ont trimé toute une vie de servantes et de préposées aux gros travaux sans autre soutien que leurs fantasmes sur leurs «époux» partis si vite qu’elles n’ont pas eu d’enfant, et que le monde a bien mal traités eux aussi. Ces ruminations de plusieurs décennies qui les conduisent souvent le soir à aller attendre sur la route par laquelle ils arriveraient si c’était possible, ont fait d’elles des femmes pauvres, seules, mais aussi autonomes. F. Xenakis leur prête même cette auto-dérision et cette pointe d'humour qui est plutôt sa marque à elle. Et quand l’une d’elle, fait rare, se marie finalement quand même… c’est pour trouver quoi ? Ça dépend.

Je le disais, une lecture plaisante sur ce thème que je trouve intéressant et qui m’a appris des choses sur le monde paysan fermé de la Sologne du 20ème siècle. J’ai découvert « le ventre jaune solognot » sur lequel, curieuse comme je suis, je n’ai pu m’empêcher de faire des recherches et une vie rurale tout sauf tendre, solidaire et empathique. L'écriture est fluide, agréable et le livre se dévore aisément.

30 novembre 2025

Nous sommes le 1er décembre 

et comme promis, je vous présente le logo des Gravillons de l'hiver.


J'espère que vous serez nombreux à participer à ce challenge qui va réchauffer notre hiver, car  voici les "Gravillons de l'hiver" qui font pendant aux "Pavés de l'été"!

Les règles sont peu nombreuses mais par contre, nous nous y tenons :

1) Lire au moins un livre  ne dépassant pas 200 PAGES (tolérance zéro pour le nombre de pages) pouvant être un roman, une (auto)biographie, un récit - témoignage ou encore un essai (mais pas de roman graphique/BD, ni de livre pour enfant, ce serait trop facile!)

2) Ce livre, vous pouvez le lire dans sa version papier ou numérique ou l’écouter en version audio, mais IL DOIT EXISTER DANS UNE VERSION PAPIER de 200 PAGES ou moins (je me référerai au nombre de pages annoncé sur les sites Fnac ou Amazon puisque c'est un renseignement qu'ils donnent toujours)

3) A la fin de votre billet, vous mettez le logo du Challenge (ci-dessus) + un lien vers la Page récapitulative (obligatoire, c'est pour nous faire connaître et qu'on soit de plus en plus nombreux) . 

Https donné ici le 21/12

Durée du Challenge : du premier au dernier jour de l'hiver inclus


Modalités de participation pour un joyeux hiver:

* Pas besoin d'inscription

* Publication des billets ou critiques sur votre blog ou n'importe quel réseau social pour les non blogueurs à partir du 21 décembre (et pas avant). Ces billets doivent obligatoirement faire au moins une quinzaine de lignes .

    * Dépôt des liens vers vos billets sur la Page Récapitulative qui ouvrira sur La petite LISTE le 21 décembre. Ils iront dans la page récapitulative le soir même si les 3 points du règlement sont ok.

N’hésitez pas à poser vos questions éventuelles dans les commentaires.

ALORS, PRÊT(E)S A RELEVER LE DÉFI 🙂 ?

Amusez-vous bien !!!

28 novembre 2025

 Les orpailleurs

de Thierry Jonquet

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9782070493197


Je découvre Thierry Jonquet avec ce roman, un excellent polar. J'avais été attirée par le titre qui m'intriguait, parce que pour moi, les orpailleurs, c'était surtout le 19ème siècle aux USA. Mais là, ça se passait dans les années 90 (le roman est de 1998) en Europe. J'ai voulu aller voir. Et j'ai eu bien raison.

« Un corps massacré est découvert dans un immeuble délabré. Non identifiable. On peut juste constater que c'est une jeune fille. Détail macabre, la main droite a été coupée. Le travail est propre, le tueur s'y connaissait. L'équipe de l'inspecteur divisionnaire Rovère est chargée de l'enquête. Une semaine plus tard, un deuxième cadavre est retrouvé. C'est aussi une femme et le rituel de l'assassinat est le même. Dès lors, l'idée d'un meurtrier poursuivant une vengeance prend forme et commence la course contre la montre pour éviter d'autres morts. »

Les personnages principaux, côté de la loi, sont donc l'inspecteur divisionnaire Rovère et la juge d'instruction Nadia Lintz. Elle a un rôle important et pas mièvre dans l'histoire, mais n'empêche que le machisme d'époque suinte un peu. Tous les personnages masculins sont nommés par leurs noms, les personnages féminins par leur prénom. L'inspecteur et elle ont des histoires personnelles très lourdes que l'on découvrira au fil du récit. Tous les personnages ont une vraie vie, une vraie épaisseur, et pourtant ils sont nombreux, ces personnages. Heureusement que j'avais pris des notes mais j'en prends toujours. C'est un roman comme on ne les fait plus, bien raconté, posément, mais sans relâcher la tension, en l'augmentant en permanence, au contraire ; avec tous les détails, mais pas un d'inutile. Les cadavres vont se multiplier quelque peu, et on va voyager jusqu'en Pologne (avec entrée en scène d'un flic local). Car on dirait que l'affaire y a eu ses racines durant la seconde guerre mondiale... Heureusement, l'un des gars de Rovère parle polonais couramment. Ça va aider. Alors, peut-être bien une ou deux coïncidences un peu grosses au démarrage, mais après, tout en finesse. On sent venir le truc mais pourtant, on ne comprend toujours pas... jusqu'à la fin.

Bref, c'est tellement bien raconté et ça m'a tellement scotchée que je lui colle 5 étoiles et que Thierry Jonquet va me revoir, si je peux m'exprimer ainsi, car il est malheureusement mort prématurément.


PS : Serie noire 1, numéro 2313


24 novembre 2025


Tovaangar

de Céline Minard

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978-2743667917


La civilisation humaine n’est plus. Céline Minard nous projette dans un monde futur qui s’est reconstruit sur ses ruines. Ici ou là, apparaissent encore des vestiges, "le betume", "le concrète", "le barraj"… en voie de disparition et qui plongent les nouveaux habitants de la terre dans la perplexité quant à leur raison d’être et dans le dégoût quant à leur composition. Nous sommes peut-être à l’ancien emplacement de Los Angeles*, bien que dire cela n’ait plus aucun sens. Le monde est maintenant habité par des êtres (appelés "corps") dans lesquels on retrouve certaines caractéristiques animales ou humaines connues actuellement, mais tout cela s’est combiné différemment et rien n’est semblable à ce que nous connaissons. Aucune espèce n’est dominante ou alors pas au-delà d’un petit territoire très délimité. Les espèces cohabitent plus ou moins harmonieusement car la loi commune est que chacune est en droit de jouir du monde. De toute façon, aucune n’aurait l’idée de consommer, détruire ou exploiter plus qu’il ne lui est strictement nécessaire. Chacune reconnaît instinctivement aux autres le droit d’exister et de veiller à ses propres intérêts. Les langages ont suffisamment de socle commun pour qu’un minimum de compréhension soit possible et généralement, bien plus. Mais tous ces langages ne sont pas oraux. Certains par exemple, comme notre héroïne, captent aussi le langage des plantes qui s’expriment par émanations. Il y a également quelques robots. Devenus autonomes, ceux qui se contentaient de l'énergie solaires continuent leurs tâches (souvent observer, archiver) et se mêlent plus ou moins aisément aux espèces biologiques. Vestiges anachroniques d’un monde haï, ils ont parfois du mal à se faire accepter. Une mémoire ancestrale les classe du côté de l'ennemi maintenant disparu.

De très anciennes légendes, dont il ne reste plus guère que des rumeurs incertaines, parlent d’un monde qui les aurait précédés, peuplé par ce que l’on appelle "les Extracts" car ils avaient basé toute leur existence sur l’extraction et la captation forcenée des ressources naturelles. Cette façon de faire méprisable et brutale portait à l’évidence en elle sa propre condamnation. Ce qui advint. On appelle cette époque "la Sauvagerie", ce qui resitue bénéfiquement ce que nous appelons aujourd’hui "sauvage". C'est dans ce nouveau monde que nous allons suivre notre personnage principal et ses amis/es. Ah oui, j'oubliais, personne n'est strictement genré, ni même spéciste.

Suivez Céline Minard qui vous emmène visiter ce nouveau monde et qui vous y introduira, vous faisant assister à des scènes et vivre des aventures qui ne peuvent que nous paraître inouïes mais dont globalement, la douceur naturelle malgré les dangers, vous étonnera et vous séduira. Vous découvrirez un monde où même les mots ne sont plus exactement les mêmes, mais surtout, c’est la relation au monde et à l’autre qui a complètement changé. Nous découvrons qu’il y a au moins une mais forcément plusieurs, façons viables d’être au monde.

Brillant, original, riche, puissant, captivant, humoristique, aventureux, expérimental, innovant, portée par une belle écriture, nécessitant un bon niveau de vocabulaire (pas de pensée riche avec un vocabulaire pauvre)… Alors qu’il figurait dans la première sélection du Prix Médicis, "Tovaangar" a été évincée de la seconde au profit d’œuvres bien moins originales et créatives. Je ne cite personne. On sait ce que valent les prix littéraires.


* Tovaangar est le nom du territoire ancestral du peuple Tongva qui correspond au bassin de Los Angeles,

20 novembre 2025

Le cas Nelson Kerr

de John Grisham

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978-2253940258

Le personnage principal de ce roman, Bruce Cable, est libraire sur l’île (fictive) de Camino, petit paradis paisible très apprécié des touristes dont pas mal d’écrivains. Il a dans la petite ville, un vrai rôle d’animateur culturel et reçoit régulièrement des écrivains pour des rencontres avec dédicaces. Il les reçoit bien et ils ne se font pas prier pour revenir. Et justement, l’une de ses préférées, Mercer Mann revient présenter son nouveau best-seller. La séance est suivie d’un excellent repas chez Cable, en compagnie d’autres écrivains installés eux, sur l’île, sauf Nelson Kerr qui s’est désisté, et tout le monde passe une excellente soirée. La suivante le sera moins car c’est celle que choisit le cyclone Leo pour changer de trajectoire et venir sur Camino. Il ne reste que quelques heures pour fuir se mettre à l’abri. Ce que fait la majeure partie des îliens, mais d’autres, estimant leur maison assez solide, choisissent de se calfeutrer, et de faire le dos rond. Au matin suivant, le libraire et son étudiant-vendeur qui a tenu à rester également, sont sains et saufs mais les dégâts sont énormes et il y a quelques victimes. Parmi elles, Nelson Kerr qu’ils découvrent eux-mêmes près de chez un ami, en faisant le tour de leurs connaissances restées sur l’île. Une grosse branche semble être tombée sur lui, mais pourquoi est-il sorti ? C’était de la folie. De plus, en grands habitués des romans policiers, Bruce et ses amis trouvent ses blessures et sa mort suspectes. Ils le disent, si bien qu’au lieu de simplement enlever le corps comme elle s’apprêtait à le faire, la police plus que débordée accepte de procéder à une autopsie, mais pour ce qui est de l’enquête… les circonstances ne s’y prêtent guère, ou du moins, il faudra attendre un peu. On devine bien que nos trois découvreurs du corps vont se charger de la faire progresser.

Je ne vais pas vous en dire plus sur l’histoire, ce sera mieux pour vous, et je vais plutôt vous donner mon avis sur ma lecture. C’est un polar bien classique pour ce qui est de la forme (ce qui n’est pas un défaut), avec des personnages (américains) crédibles et humains. Pas de grands excès simplificateurs, de tueur fou, de super-héros, de conduite irrationnelle etc. Il y a une excellente idée au niveau des mobiles et la progression de l’enquête est bien racontée. Pas de temps mort, pas d’ennui, pas d’invraisemblances. Le regard sur le monde de exploitation économique de la fin de vie par les laboratoires, les maisons de retraite etc fait frémir le lecteur, d’autant qu’il est tout à fait crédible. (Saisie d'un doute, je suis allée jusqu'à faire des recherches... c'est dire).

Ce roman est peut-être mon premier Grisham (comment se souvenir de tout ce que j’ai lu?) et je dois reconnaître que c’est du travail bien fait. Bien organisé, bien raconté et avec une idée originale (il y a tant de polars qui ne font que répéter une histoire déjà lue ou vue cent fois!). Il n’est donc pas impossible que j’audiolise d’autres romans de cet auteur et je lui colle quatre étoiles..

16 novembre 2025

Canardo premières enquêtes

de Sokal

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978-2203335547

Vous allez me dire qu’en ce moment je fréquente beaucoup le peu recommandable Canardo, et vous aurez raison. C’est pourquoi j’ai pensé qu’il serait temps de mieux me renseigner sur le personnage et quoi de mieux pour ce faire que de découvrir ses débuts ? Rien. (c’était une question rhétorique) et voici donc ses premières enquêtes. Canardo officie dans les basse-cours et autres corps de ferme et c'est un personnage particulièrement peu recommandable, alcoolique, dangereux, vénal… mais cela ne l’empêche pas de gagner sa vie en résolvant (ou pas) quelques mystères dans un monde d’animaux anthropomorphes particulièrement glauque et violent.


Pour ses loisirs, il fréquente les bouges et c’est là qu’il rencontrera une certaine grue cendrée aux charmes de laquelle il ne restera pas indifférent… (c'est peu dire) et que nous retrouverons quelques albums plus tard dans "La marque de Raspoutine".



Il sera aussi confronté à un dangereux gang de rats. Donc, accrochez-vous, Canardo a commencé très fort. Dans cet album il a connu une passion amoureuse, il est passé devant les juges, il a tué plusieurs "personnes", il a lui-même "encaissé" plusieurs balles. Il s’est même marié et rangé des voitures, et puis aussi suicidé, non ?



Sacré Canardo ! Il nous avait déjà tout fait dès ces premières enquêtes, qu’a-t-il bien pu mettre dans tous les albums suivants ???

(Nouvelle question rhétorique)

Bref, c’est noir de chez noir, ambiance "Le chien debout", mais très nerveux, sans filtre, et ça part dans tous les sens. Le graphisme est déjà sublimissime. Quel maître, ce Sokal !

12 novembre 2025

Zem

de Laurent Gaudé

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978-2330140946


Moitié polar moitié science fiction dystopique, ce roman est la suite de «Chien 51». Nous retrouvons Zem Sparak ainsi que l’inspectrice Salia Malberg, tous deux à moitié détruits mais toujours debout. Salia poursuit sa carrière dans la police tandis que Zem est devenu le garde du corps personnel de Barsok, un des hommes à la tête du pouvoir chez Goldtex. Les conditions de vie sont de plus en plus difficiles pour tous les cilariés maintenant que la pénurie d’eau s’est installée, mais la classe dominante de la zone 1 n’envisage pas de se priver le moins du monde. L’important, c’est le mélange de force coercitive et de distraction qui maintient le peuple dans la soumission. Aussi Barsok a-t-il lancé des «Grands Travaux» qui occupent les gens et promettent des améliorations.

En attendant, l’actualité du jour est l’arrivée au port d’un cargo chasseur d’icebergs traînant une prise rare qui permettra la mise en bouteille de milliers de bouteilles d’une eau (enfin) pure datant de l’ère glaciaire et ne contenant donc aucune pollution. Evidemment ces bouteilles se vendront hors de prix et peu nombreux seront les futurs propriétaires. Mais tout est déjà vendu alors que dans les rues, la foule se précipite pour gober les gouttes d’une des trop rares averses…

Alors que Zem accompagne Barsok sur le port pour la cérémonie d’arrivée de l’iceberg, Salia débarque car elle a reçu une information disant que quelque chose d’anormal allait se passer pendant cet événement, et c’est bien ce qui se produit en effet. Un porte-conteneurs fonce dans la foule. A l'intérieur du conteneur, cinq cadavres dans un état anormal. Salia en tant qu’inspectrice chargée de l’enquête et Zem en tant que représentant de Barsok se trouvent alors à nouveau réunis pour une enquête plus définitive que la première.

Il y a de l’action, une tension qui ne se relâche jamais, des surprises, un univers poignant, une peinture sociétale et une projection dystopique très pessimiste (mais ceux qui en proposent une optimiste deviennent rarissimes). Peut-on résister dans un monde hyper surveillé et contrôlé? L'état est si puissant, l'individu si faible... Zem et Salia incarnent-ils l’espoir ? Vous le saurez en découvrant leurs aventures.


PS : ici encore, un des «personnages» est un robot doté d'une IA. C'est le cas dans beaucoup des romans que je lis maintenant. Les écrivains au moins ne sont pas comme les hommes politiques, à se demander encore si on va autoriser ceci ou interdire cela. Ils savent que cela fait un moment que le problème ne se pose plus en ces termes. 

Extrait:

(Elle demande au robot quelque chose qui va à l'encontre de sa programmation)

" - Je le ferai

- Merci

D'où viennent ces mots? Elle ne saurait le dire. Existe-t-elle vraiment, cette conscience de machine? De quelle nature est leur amitié? Est-ce un dysfonctionnement, une sorte d'accident de programmation ou, au contraire, le stade ultime du progrès? Elle l'ignore - comme elle ignore pourquoi Motus a décidé d'être avec elle, pleinement, totalement."